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Channel: Comments on: Permettre les usages publics des images
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By: François Brunet

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Merci André pour ce texte fort et synthétique de beaucoup de choses que tu as dites et faites depuis des années et pour lesquelles nous te remercions et te soutenons. A titre de complément je voudrais ajouter deux choses.
1) L’exception de citation correspond à ce qui est appelé “fair use” en droit américain, et la demande de reconnaissance en droit français de cet usage à la fois pédagogique et social, qui comme tu le dis est une base de la culture vivante, est fondée notamment sur le droit ou plutôt l’usage américain. Or beaucoup d’indices suggèrent que le fair use est battu en brèche aux Etats-Unis, et que les éditeurs universitaires, notamment, s’entourent de plus en plus de précautions. Voir aussi les évolutions récentes du régime du copyright, qui étendent en durée la protection non pas des auteurs mais des détenteurs de droits de publication. Le problème est assez réel pour que les grandes presses universitaires américaines commencent à s’en soucier sérieusement.
2) Puisque tu prends l’exemple d’OJ Simpson dans les couvertures de Time et de Newsweek en juin 1994, je constate que tu reproduis ici ces images, sans autorisation je suppose, et j’applaudis. Or, nous avons, pour l’ouvrage récemment publié “L’Amérique des images, Histoire et culture visuelles des Etats-Unis” (Hazan/Paris Diderot), essayé de reproduire légalement la couverture de Time, à titre d’exemple des controverses sur l’image à l’ère numérique. Il ne nous était pas possible, dans le cadre d’une édition commerciale, de faire autrement; et d’ailleurs nous voulions justement obtenir ce type d’autorisation. Il nous a été répondu par TIME/LIFE que cette image n’était pas actuellement ouverte à “licensing”. Nous avons rétorqué que cette image était disponible sur des centaines de blogs, mais la réponse a été réitérée. Il s’agit là d’un cas de censure pure et simple; bien entendu la question reste ouverte de savoir ce qui se serait passé si nous avions publié l’image sans rien demander. Dans d’autres cas (extraits de séries TV notamment) nous avons essuyé des refus de droits ou des demandes de droits exorbitantes, pour des images (le générique de Desperate House Wives, l’affiche de Battlestar Galactica, etc.) qui sont partout sur le web. Dans d’autres cas encore nous avons obtenu des droits en payant des sommes élevées, notamment auprès de PARS pour une couverture de Newsweek sur 9/11. (Heureusement, pour la majorité des images souhaitées, nous avons pu négocier des autorisations raisonnables, notamment avec les auteurs eux-mêmes quand c’était possible.) Nous en avons déduit que les grands conglomérats de médias et autres distributeurs (notamment de fiction télévisée), renonçant de fait à contrôler quoi que ce soit sur le web mais concentrent leurs efforts sur l’édition papier et notamment l’édition papier commerciale. (Beaucoup de publications universitaires, en France comme ailleurs, continuent à se passer de ces procédures — pour combien de temps?) Il s’ensuit un partage intrigant des schémas de transmission et de légitimation, qui mériterait un diagramme comme ceux que tu nous proposes ici. Le savoir des blogs et des médias sociaux peut, en pratique, citer des images sans autorisation. Le savoir des livres (qui sont aussi des objets commerciaux plus quantifiables, pour le moment) ne le peut pas (mais il peut supposer ou indiquer que les images qu’il cite sont disponibles en ligne). Il s’ensuit que la reproduction d’une image sur papier dans un ouvrage disons “grand public” devient un enjeu de légitimité voire de pur prestige — ce qui, entre autres choses, sert à renforcer l’économie des “icônes”. Bourdieu, au secours.


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